Trop désireux de devenir enseignants
 

Mencius (un célèbre philosophe et sage chinois, et l'un des principaux interprètes du confucianisme dans les temps anciens) a dit : « Le problème avec les gens est qu'ils sont trop désireux de devenir enseignants. » Cela signifie que le plus grand défaut de l’homme est de vouloir être l'enseignant des autres, c’est-à-dire qu’ils se réjouissent beaucoup de se prendre pour "l’enseignant". Ceux qui sont "trop désireux de devenir enseignants" partagent en commun les caractères suivants : pas assez humbles, toujours égoïstes et jaloux, hautains, arrogants dans l'attitude, présomptueux et obstinés. Ils se considèrent comme supérieurs aux autres. En outre, ils s’attachent à leur "égocentrisme" et n’aiment pas accepter les critiques des autres, ni leurs conseils. Par ailleurs, en se contentant de se reposer sur leurs lauriers, ils sont réticents à s’abaisser pour apprendre des autres (experts). Bien qu'ils soient incapables de saisir vraiment les principes fondamentaux, ils sont trop désireux de se montrer. Ayant seulement des connaissances superficielles, mais des paroles exagérées, ces enseignants font finalement que la connaissance apprise est éloignée de son apparence initiale et par conséquent, ils nuisent à la fois les autres et eux-mêmes.

Pourquoi les gens sont toujours "trop désireux de devenir enseignants" ? Est-ce le fait qu'ils peuvent exhiber leurs connaissances en étant enseignants ? Ou y a-t-il d'autres raisons derrière ? En fait, c’est l'une des caractéristiques dans une société. Peu importe si le lieu concerné est aussi grand qu’un pays, une société ou juste plus petit comme une organisation, une petite foule, "l’unanimité" est un facteur important pour les gens d'y exister avec réussite. La cognition d'un individu est basée sur le "soi-même" comme centre. Quand sa cognition est largement acceptée et identifiée par le public, "l’harmonie" émergera alors. En conséquence, les gens peuvent vivre ensemble dans l'harmonie et une "société pacifique" unifiée sera ainsi construite.

Le fait de "se montrer avec ostentation" qui provient des "rivalités" est un moyen "de dissuader les autres". Pour éviter de faire usage de la violence dans les rivalités, on doit dépendre du fait de "se montrer" (pour gagner). Par exemple, les gorilles frappent leurs poitrines ; les grenouilles vertes font beaucoup de bruit, etc. Ces actions sont considérées comme une sorte de "comportement de communication" chez les animaux pour informer leurs concurrents sur eux-mêmes, en incluant le sexe, la séduction, la force, le domaine de territoire, la supériorité et l’exceptionnel. L’être humain apprend cet instinct mais l'emploie avec des motivations et des objectifs plus complexes. Selon les psychologues, les gens qui sont "trop désireux de devenir enseignants" sont des maniaques, ils se vexent et se vengent plus facilement.

Il y a une métaphore dans le Sutra Vajra【金剛經】. Le Bouddha dit à Subhuti (un de Ses disciples) : pour un pratiquant bouddhiste qui apprend le Bodhisattva-carya (la Voie du Bodhisattva), une fois qu’il se considère comme supérieur et qu’il se trouve lui-même extraordinaire, il est déjà attaché à « l'apparence de soi, l'apparence d’une personne, l'apparence d’un être vivant et l'apparence d’une durée d’existence (longévité) ». Ce genre de personne, comme dit le Bouddha, « est considéré comme un "non-Bodhisattva" », c’est-à-dire que cette personne ne pratique pas vraiment le Bodhisattva-carya.

Certains pratiquants bouddhistes qui pensent avoir lu beaucoup de sutras et qui ont vécu certaines sensations dans leur méditation comme le fait de voir quelques lumières, de voir quelques ombres ou de faire des rêves de bon augure, etc., se croient alors exceptionnels, voire supérieurs. Ils deviennent insupportablement arrogants et se considèrent comme les meilleurs dans le monde. Ils pensent qu'ils sont déjà qualifiés de Guru pour prêcher le Dharma du Bouddha, pour accepter des offrandes et des vénérations par les êtres sans se rendre compte qu'ils ont en fait planté les graines dans les trois mondes inférieurs ! Sur la base de la règle de cause à effet, celui qui n'a pas encore atteint la véritable réalisation dans sa pratique mais commence l’enseignement du dharma, au cas où l’on fait des erreurs dans ses enseignements entraînant quelqu’un d’autre à avoir des concepts erronés dans le Bouddhisme ou même le rendant égaré, cet "enseignant" du dharma va certainement souffrir des effets karmiques ! Il y avait une fois un grand maître qui avait fait l’erreur d'un mot dans son enseignement du dharma ; il fut contraint à souffrir le karma de se réincarner dans l’esprit d’un renard durant cinq cents cycles de vie après la mort. Si l'erreur commise concerne les aspects des théories et de la pensée, de l'expérience dans la pratique ou de l’astuce verbale de la lignée dans le Bouddhisme, etc., les conséquences sont encore plus sévères et critiques. Ainsi, il faut être très prudent au moment de mener l’enseignement du dharma !

Devadatta était le cousin du Bouddha, il avait été tonsuré et avait rejoint le Sangha au moment où le Bouddha était de retour dans sa ville natale pour prêcher le Bouddhisme. Il était ainsi l'un des disciples du Bouddha. Devadatta était habile et vif d’esprit ; il se consacrait avec ferveur à la pratique durant ses douze premières années de vie de moine. Cependant, il était si ambitieux qu'il voulait prendre la place du Bouddha en tant que leader du Sangha. Il devenait encore plus arrogant et présomptueux par la suite. Malgré son échec, il avait essayé de faire différents plans de nombreuses fois pour assassiner le Bouddha. Comme il était incapable de tuer le Bouddha, il commençait à créer des séparations au sein du Sangha sous le désir important de devenir enseignant. Finalement, il mit en place un nouveau Sangha et introduit de nouvelles méthodes d'enseignement. Bien qu'il eût réussi à attirer environ cinq cents apprentis de le suivre, il tomba en enfer et souffrit lorsqu’il mourut après sa mort en raison de l'accumulation de karmas incluant le désir cupide de la richesse et de la gloire, la rancoeur contre le Bouddha et le fait de Lui avoir fait du mal, d’avoir fait saigner le Bouddha, d’avoir perturbé l'harmonie de la communauté des moines et établi un nouveau Sangha, etc. En enfer, il était enfermé dans une grande montagne qui brûlait violemment et souffrait de nombreux différents types de douleurs durant un grand kalpa.

Voici un autre exemple : dans le Zen, du premier patriarche, Bodhidharma, jusqu’au sixième et dernier patriarche, Huineng, l'héritage de nouveaux patriarches était identifié par la transmission de la robe du maître et du dharma simultanément. Comme mentionné dans le dicton, « la robe agit comme le symbole de l'héritage et elle va être remise de génération en génération. Le dharma est transmis de cœur à cœur tandis que sa signification est saisie à travers un éveil direct. » Comme le sixième patriarche savait très bien que les êtres étaient remplis d'ignorance et de karma, il changea catégoriquement la tradition de passation de la robe du maître et du dharma simultanément au successeur avant qu'il ne quittât le monde. Il donna des instructions particulièrement à ses disciples accomplis que : « La robe du maître ne va plus être transmise aux générations à venir. » Son but était d'éradiquer complètement la lutte des descendants pour la robe et leur désir d'être l’héritier du dharma. Malheureusement, avec la présence de ceux qui avaient seulement une connaissance superficielle mais "trop désireux d'être des enseignants", ils prétendaient comprendre les intentions de Huineng, mais en fait, ils les avaient mal interprétées et induisaient par conséquent les apprentis en erreur. Cela finissait par faire tomber du sable et de la boue (un désordre) dans la Forêt Zen (monastère bouddhiste) qui était initialement paisible et tranquille. A l’époque de Nanyang Huizhong, l'enseignant national lors de la dynastie Tang (mort en 775), il y avait déjà des gens du sud qui essayaient de mal interpréter la nature de Bouddha du sixième patriarche !

Apprendre le Bouddhisme a pour objectif principal d'accéder au royaume du Bouddha de manière à atteindre l'illumination en définitive. Après cela, on peut s’engager dans la voie du Bodhisattva pour sauver tous les êtres. Libérer les êtres est la responsabilité de tous les bouddhistes. Mais si le bouddhiste n'a pas encore atteint lui-même la réalisation, sur quoi peut-on compter pour libérer les êtres ? De même, quand un étudiant tente d'enseigner un autre étudiant qui est seulement dans une classe en-dessous, l'enseignement sera probablement inefficace comme ce senior n'a pas encore pleinement compris ou saisi la connaissance, on connait simplement un peu plus sur le sujet que son camarade de classe junior. Pour être un enseignant qualifié, on doit non seulement posséder suffisamment de connaissance académique, mais on a aussi besoin d’être bon en personnalité et en caractère de telle sorte que l’on puisse enseigner ses élèves correctement. L’exigence d'un enseignant à l'école (sur Terre) est déjà tellement stricte et rigoureuse, qu’en est-il des exigences d'un Guru qui enseigne le Dharma du Bouddha, quelque chose de spirituel ? Un pratiquant bouddhiste doit avoir les pieds sur terre et être diligent dans la pratique tout en renonçant à la réussite rapide et au bénéfice immédiat. Même si on atteint un certain niveau de réalisation dans sa pratique, on ne doit pas se complaire dans cela. On doit rester humble et continuer d'apprendre modestement. Apprendre le Bouddhisme est équivalent à atteindre un esprit pur libéré de doute ou de souillure. On devrait également avoir un esprit large et tolérant. Voyant que quelqu'un d'autre peut obtenir de meilleures réalisations, on devrait s'en réjouir et faire l'éloge de ses accomplissements. En outre, on devrait consulter fréquemment les kalyana-mitra (bons maîtres spirituels) de telle sorte que l’on puisse profiter des progrès continus dans la pratique et ainsi apporter des améliorations dans le cœur et l'âme spirituellement. Tout comme le dit le proverbe : « La fierté blesse, la modestie est bénéfique. » Faites bien attention, nous pouvons facilement tomber dans le piège d'être "trop désireux de devenir enseignants" sans s’en rendre compte !